La poudrière de Corroy-le-Château

A la limite de Gembloux et de Corroy-le-Château, se trouve la rue de la Poudrière. Peu de Gembloutois se souviennent qu’à cet endroit on a fabriqué de la poudre à canon au XIXe siècle. Et pourtant, il existe encore quelques vestiges de cette activité.

Ruines de la poudrière – Photo Pierre Aubry 2018

L’histoire de cette industrie insolite remonte à la fin des années 1830. A l’époque, l’ex-colonel suisse Tschiffely, s’installe à Gembloux. Il est en contact avec le colonel Schepeler, un prussien. Les deux hommes s’intéressent à la poudre à canon. Ils ont mis au point un procédé de fabrication qu’ils déclarent « supérieur à tout autre connu ».

Poudrière - Entête mandat
Document: Pierre Aubry 2018

En 1840 ils constituent une société avec le Marquis de Trazegnies, le notaire gembloutois de Lathuy et le lieutenant-colonel belge Winssinger. La société s’appellera Poudrière de Corroy-le-Château. Tschiffely et Schepeler apportent le procédé de fabrication et les autres un fonds social de 45.000 F. Le Marquis possède un terrain au lieu-dit Baraque Tricot, le long de l’Orneau entre Corroy et Gembloux. Il le loue à la société.

En mai 1841, on construit une usine et une maison à cet endroit. L’usine comportait deux grands bâtiments rectangulaires. Elle était destinée à la fabrication de « poudre à tirer, de guerre, de chasse et de mines ». La maison était celle du directeur.

Un barrage est aussi installé sur l’Orneau. Il produit une chute d’eau de 5 mètres activant une roue hydraulique mettant en mouvement des machines à broyer.

La position de la poudrière sur la carte réalisée par le CRAHG

Au début de 1842, cinq ou six ouvriers et ouvrières commencent la production sous l’autorité du régisseur Tournay. Après 1849, ce dernier sera remplacé par Antoine Jeanmart. Parmi les ouvriers ou les personnes ayant travaillé à la poudrière, j’ai retrouvé notamment les noms de Bastin Piérard, Pierre Gillis, Jean et Désiré Dallebroux, François et Joseph Lalmand, Auguste et Charles Renier, François Martin, Joseph Degraux, Siscot, Constant Naniot, Cartia, Jean Lermignaux, Alex Meidel, Lekeux, Lenon, Aoust, etc.

Les matières premières pour la fabrication de la poudre sont le charbon de bois, le souffre et le salpêtre. A Corroy-le-Château, le charbon de bois a été généralement produit sur place ou dans les environs. Le souffre est d’abord venu de Vedrin, puis – après 1850 – de Marseille, via le port d’Anvers. Le salpêtre a été fourni par la firme Coppal, de Wetteren.

Le souffre et le salpêtre étaient transportés par le chemin de fer d’Anvers à Namur, puis, progressivement selon l’agrandissement du réseau ferré, à Charleroi, à Tamines et finalement à Gembloux, que le rail atteint en 1855. Des chariots amenaient les sacs jusqu’à Corroy. La ligne de Chapelle-Dieu n’existait pas encore. Elle ne sera mise en service que le 5 mars 1877. De 1850 à 1861, l’usine a reçu plus de 120 tonnes de souffre et de salpêtre.

A Corroy, la poudre produite était stockée dans des tonneaux en hêtre de 50, 25 et 12,5 kg déposés au fond de l’Orneau pour éviter tout accident. La livraison de la poudre était très réglementée et soumise à autorisation spéciale du Gouverneur de la province. Elle se fera sous escorte militaire jusqu’en 1858. Pendant le transport, les barils devaient être recouverts « d’une peau humide ». Toutes les communes traversées devaient être prévenues avec l’heure de passage.

La poudre produite était destinée aux mines et aux carrières, à des entreprises de travaux publics et à l’Etat belge. Le Ministère de la Guerre en a, par exemple, commandé 2500 Kg en 1845.

L’entreprise fabriqua aussi des poudres pour les feux d’artifice, des chandelles fusantes, des étoiles lumineuses et des feux de Bengale multicolores. La société a été très prospère et connue pour la qualité de ses produits.

En 1860, l’usine est endommagée par une explosion. Cette explosion et des difficultés financières sont probablement la cause de la fin des activités en 1864. La mort inopinée du Marquis de Trazegnies précipite aussi la fermeture définitive de l’usine.

Sources:
(1) Pierre Aubry, , https://aubrypierre.wordpress.com/publications/poudriere/, 2018
(2) Fonds de Corroy-le-Château (liasses 1811-1821), inventoriées par par Mme Douxchamps-Lefèvre aux Archives générales du Royaume à Namur
(3) Jean Fichefet, Bulletin du Cercle Art et Histoire de Gembloux et environs Tome II -n° 15 – Juillet 1983
(4) Cercle Royal Art et Histoire de Gembloux, http://www.crahg.be/souv/la-poudrerie-de-corroy.html
(5) Canal Zoom, L’histoire du jour: la poudrière de Corroy-le-Château, 2020


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